Monte Estremu - Tana di l'Orsu - 06/2012 :
Ce n'est plus cette fois-ci un seul ravin, mais un entrelacs de ravins correspondant à la haute vallée du Fangu selon l'IGN, du ruisseau de Bocca a Rossu pour Fabrikant !
Le problème, c'est que pour accéder à ces ravins cela se complique très vite (dès l'arrivée au couvent de Santa Maria...) et que s'il n'y avait pas cette magnifique tracé cairnée menant au repaire de l'ours, ce serait encore plus délicat, même en restant en RG du Fangu sans aller voir l'ours !! La visite de la longue vire horizontale sous les 600m de la paroi de la face W du Capu Tafonatu et un bivouac à la verticale de son "trou" sont des moments d'anthologie...
Le sentier du couvent de Santa Maria
Ce sentier partant de Monte Estremu a sans doute été utilisé pour aller au couvent dans un temps lointain. Aujourd'hui, s'il démarre idéalement au début en vous berçant d'un optimisme béat (enfin un sentier corse tenant la route !), cela ne dure que 20 minutes. Ensuite, très vite il s'encombre de végétaux drus, d'abord à hauteur du visage (on baisse la tête), puis à hauteur de la ceinture (on rampe) et se transforme peu après en un boyau végétal traversant plusieurs bandes de ronces, en plusieurs lacets dont certains perdent toute trace après des traversées de ruisseaux mystérieuses ! Ce n'est que la 1ère série des épreuves. Ensuite, la trace, déjà pas bien belle, devient un marquage discontinu chevauchant les célèbres calycotomes (Cf. Maquis corse : Calycotome) particulièrement sévères sur ce flanc du Fangu ! Plusieurs longues pertes complètes de la trace sont à endurer, ainsi que l'épreuve d'orientation qui s'ensuit, avant de trouver difficilement le "couvent". Je ne sais ce que pouvaient faire ici les moines ou les nonnes qui y venaient, mais il semble certain que personne n'a jamais imaginé habiter ce qui ne reste que quelques ruines de murs qui n'ont jamais dû dépasser un mètre de haut et en aucun cas pu constituer un abri. Mystères de l'archéologie corse !
Bien entendu, après avoir emprunté deux fois ce "sentier" pour monter vers le Tafonatu (1 heure pour aller au couvent à vue : essayez et dites-moi si vous faites mieux ?), un villageois de Monte Estremu, auprès de qui je m'enquérais de l'état du sentier, me signala que personne ne le prenait plus puisque "il était si simple de monter la piste du pont des Rocce en voiture jusqu'en face du couvent et de traverser le Fangu pour l'atteindre en 10mn". Mon pauvre monsieur, la Corse n'est plus ce qu'elle était : même les Corses ne marchent plus !
P.S. : Désolé, mais vous ne pourrez plus essayer ce chemin maquisé. En effet, aux dernières nouvelles de juin 2005, ce sentier est à nouveau démaquisé et balisé (info. François Despax du 31/12/05).
• Accès : Directement depuis Monte Estremu (extrémité Sud du village, bout de la route, branche de droite), rejoindre le couvent de Santa Maria par le "sentier du couvent de Santa Maria" (1h - ce sentier est à nouveau démaquisé et désormais balisé en orange depuis juin 2005 comme première partie du sentier de Caprunale permettant d'éviter la remontée, fastidieuse à pied, de la piste du pont des Rocce).
Variante : Traverser Barghjana (fond de la vallée de Galeria/Mansu), puis prendre sur la droite la piste carrossable du pont des Rocce, qui est le départ de l'ancien chemin de transhumance Falasorma - Niolu via Bocca di Capronale. Passer le pont des Rocce et continuer sur environ 1,3 km pour se garer au mieux près du point IGN 303 sur le côté de la piste, face au couvent de Santa Maria en face sur l'autre rive du Fangu (murs ruinés peu visibles). Une petite statue de Vierge à droite de la piste marque l'endroit où une sente démarre juste en face à l'aplomb vers le fleuve et remonte de l'autre côté jusqu'au couvent (400m - 10mn).
• Dénivelé : 1200m environ (de 350 à 1550m) pour la fin de la trace cairnée ("chorten").
• Itinéraire : Après le couvent, en allant vers le torrent, on trouve une sente cairnée sur la gauche, dont le début, sous un toit d'arbustes, est un peu difficile à suivre mais qui devient ensuite une trace assez bien marquée. Cette trace suit le Fangu en RD, rentre dans une vallée encaissée, dirigée droit sur la formidable face Ouest du Capu Tafonatu qui en ferme le fond, puis traverse 2 fois le torrent dans ses lacets. Elle le quitte vers la gauche à la 2ème traversée pour monter une pente d'éboulis raide, puis rejoindre un vallon très boisé le long d'un ruisseau affluent. Le vallon se rétrécit pour devenir couloir, encombré d'arbrisseaux et de bruyères arborescentes, et l'on finit par arriver à un col (1150m - 3h depuis le couvent) surplombant le Fangu de 200m au départ du canyon qu'emprunte le ruisseau descendant de Bocca a Rossa. La trace continue ensuite et remonte la RD de ce ruisseau au-dessus : on longe ainsi par la gauche l'échine rocheuse qui masque encore le Capu Tafonatu, quitte la forêt de Tana di l'Orsu vers 1350m et arrive ensuite à un cirque rocheux très raide après une traversée de vire étroite et aérienne. En continuant à suivre les cairns, on escalade la falaise sur le versant gauche de ce cirque, sous l'amphithéâtre caractéristique de roches colorées de Campu Razzinu, par des vires aériennes et des couloirs raides : après un petit pas d'escalade exposé, on atteint le sommet de la falaise vers 1500m et, par une grande traversée horizontale sur la droite passant par une brèche, puis le pied de l'amphithéâtre de Campu Razzinu et encore un col rocheux marqué par deux grands laricii, on atteint un énorme cairn (le "chorten") marquant la fin de la trace (1550m environ - 4h45 à 5h depuis le couvent). Au-delà, on peut grimper aisément jusque vers la vire de Scaffone (Andade a u Ponte - 1650m - 5h30) par un couloir mi-herbeux, mi-rocheux passant à gauche d'un grand pan de muraille verticale en rocher ocré. On peut aussi continuer à remonter le ruisseau de Bocca a Rossa (traversée de dalles rocheuses délicates de l'autre côté du couloir) pour aller rejoindre le bout de l'échine rocheuse de Tana di l'Orsu et son col caractéristique (le seul arbre de cette crête vers 1700m !) : on surplombe alors la vire du Tafonatu que l'on peut rejoindre rapidement en descente ainsi que Campu di Vetta, bivouac à son extrémité Sud utilisé jadis par les bergers locaux (6h à 6h30 depuis le couvent), avec de l'eau dans le ruisseau en contrebas au Sud.
• Retour : Via le même chemin (attention au pas d'escalade exposé à la descente : cordelette indispensable pour assurer les non-grimpeurs). Il est sans doute possible de trouver une voie plus facile en descendant directement dans le couloir au lieu de suivre les cairns sur son arête en RG...
• Descente : 4h à 5h environ jusqu'au couvent (attention à la descente de la falaise qui demande d'assurer les non-grimpeurs ou sujets au vertige et peut faire perdre beaucoup de temps), puis 10mn pour retour à la Vierge de la piste du Pont des Rocce ou 1h par le sentier vers Monte Estremu.
• Intérêt : Découverte de ce(s) ravin(s) peu connus (pas de topos en ma possession) à travers une sente cairnée, encore utilisée par les derniers chasseurs de Barghjana/Monte Estremu et relativement bien entretenue. En fait, toute la montée du couloir et du col de Tana a l'Orsu avant l'arrivée surplombe le Fangu sur sa RD : c'est au col 1150m que l'on s'en aperçoit en dominant le torrent de plus de 200m à pic ! Contrairement à ce que j'avais pensé lors de ma première tentative, il semble impossible de rejoindre directement Campu di Vetta depuis le col 1150m ou même plus haut : on est obligé de poursuivre vers le cirque rocheux terminal au-dessus de Tana di l'Orsu, puis de continuer jusqu'au col à la fin de l'échine rocheuse à la hauteur du pied de la paroi du Tafonatu. Le terme de la randonnée est un magnifique belvédère sous la terrifiante muraille Ouest du Capu Tafonatu qu'on s'imaginerait facilement escalader (600m de paroi sous le trou perçant le sommet). Le Fangu prend lui sa source (?) sur la droite de cette superbe face, dans un cirque rocheux minéral effarant : je n'ai vu cela qu'en été, mais ceux qui l'ont vu sous l'orage ont été effarés par le nombre et l'amplitude des cascades qui envahissent ces canyons rocheux de tous côtés et le Grand Couloir Central du Tafonatu est toujours sacrément aquatique !
En fait, il existe une deuxième montée, plus simple et plus directe si l'on veut aller à Campu di Vetta à l'extrémité Sud de la vire du Tafonatu, qui consiste à continuer dans le Fangu au lieu de le traverser pour bifurquer sur le ravin de Tana di l'Orsu : d'abord dans le lit du torrent (beaucoup de maquis), puis en RG où l'on peut remonter un couloir qui mène à une sorte de vire longeant le ruisseau 80m plus haut et menant directement à Campu di Vetta. Il semble aussi qu'une montée directe soit possible par une des branches de gauche des affluents supérieurs du Fangu en arrivant à l'autre extrémité de la vire du Tafonatu (?).
N'hésitez pas à consulter la carte ci-contre représentant cette région des hauts ravins du Fangu avec son approche depuis Monte Estremu, la trace cairnée en RD du Fangu montant par Tana di l'Orsu, la vague sente explorée en RG du Fangu et les vires des cirques de Campu Razzinu (l'Andade a u Ponte) et du pied de la face W du Capu Tafonatu !
Deux diaporamas sur ce parcours exceptionnel :
Jean-Paul,
Il est possible que la trace "rubalise" soit un marquage de l'un des anciens accès de montée à Bocca Laggera et les bergeries de Scaffone. Historiquement, les gens de Monte Estremu y montaient par là, ou, plus souvent, par un sentier montant à Bocca Rustali au N de Bocca Laggera où une vire exposée démarrait la voie de l'Andadonna... Peut-être, certains au village essaient-ils de refaire cette trace ? Achille, le garde ONF à la MF de Piriu m'en avait parlé et m'avait dit qu'il avait essayé d'y monter par là, en vain !!
Sinon, pour la montée à Tana di l'Orsu, vous devez faire partie de la dizaine de personnes qui y montent ANNUELLEMENT !
Félicitations, donc...
Le 28 juin dernier, nous (quatre) sommes allés vers Tana di l'Orsu.
Le sentier de Montrestremo au couvent est très bien démaquisé et balisé.
Peu après (3 à 400m) avoir pris la sente en rive droite du Fango, nous avons été trompés par un balisage de rubans (rubalise) accrochés dans le maquis et s'éloignant du Fango en montant sur la gauche (nord). Grace au topo de Corse Sauvage nous avons compris l'erreur et avons fait demi tour pour reprendre la trace cairnée, pas toujours facile à suivre, en bordure rive gauche du Fango.
Nous avons poursuivi et avons fait demi tour un peu plus haut après la deuxième traversée, vers 1100m d'altitude.
Je pense que nous étions dans les tout premiers de cette année. Pas de trace, repère, branche cassée, végétation foulée pouvant nous faire supposer que quelqu'un était passé avant nous.
Je compte bien revenir dans ces vallons, il y a beaucoup à découvrir, et surtout l'avantage d'être à peu près certain de rencontrer personne.